Albert LAROCHE
Belgique - Chambre des Représentants - session du 20 juillet 1945
ELOGE FUNÈBRE DE M. LAROCHE
M. le président se lève et devant l'Assemblée debout prononce l'allocution suivante :
Mesdames, messieurs, le 24 avril dernier, à la suite du décès de notre regretté collègue M. MATERNE, nous avions admis au sein de cette assemblée, son successeur, Albert LAROCHE, avocat à Arlon. Nous ne pûmes en ce moment recueillir son serment parce que, comme tant d'autres, il n'était pas revenu d'Allemagne. Depuis près d'un mois, nous avons reçu avis de son décès. Mais, par respect de la douleur de ses proches, qui ne pouvaient se résoudre à croire à la réalité d'un si affreux malheur, nous avons cru pouvoir différer cette triste communication. Aujourd'hui, hélas, aucun doute ne peut plus subsister et je dois vous faire part du décès de M. Albert LAROCHE, survenu le 10 janvier 1945 au camp de Neuengamne (Hambourg).
Le défunt état âgé de 40 ans. Il laisse une veuve et quatre enfants.
Dès le début de sa carrière publique, nous voyons M. LAROCHE à la présidence de la Ligue des Travailleurs chrétiens de l'arrondissement d'Arlon et bientôt de toute la province de Luxembourg. Son dévouement à la classe ouvrière, les initiatives généreuses auxquelles il présida, son talent oratoire, sa fougue dans les débats, lui valurent bientôt cette juste popularité qui, en 1936, devait le faire élire comme membre suppléant de cette Chambre. C'est au cours de cette joute électorale qu'on le vit s'attaquer avec une force et un courage admirables au rexisme, qui déjà préparait ses armes contre nos libres institutions. Au cours d'une de ses âpres rencontres avec les séides de ce funeste mouvement, il eut des paroles qui sonnent comme des prophéties: "Nous proclamons, s'écria-t-il un jour, notre attachement profond aux libertés constitutionnelles. Nous nous prononçons catégoriquement contre toute forme de dictature et nous ne pouvons admettre que la violence, la terreur, l’assassinat, les camps de concentration et les poteaux d'exécution puissent être des moyens de gouvernement. "
M. LAROCHE dénonçait le crime avant qu'il fût consommé chez nous; il devait en être victime bien peu de temps avant qu'il ne pût être vengé.
M. LAROCHE fut arrêté, en même temps qu'une quarantaine d'Arlonais, dans la nuit du 24 au 25 août 1944. Les premières nouvelles que l'on apprit de lui mettaient en valeur le magnifique courage qu'il déploya au cours de cette redoutable épreuve pour y faire face lui-même et soutenir le courage des autres. Après un affreux voyage de deux semaines, la sinistre caravane arlonaise échoua à Neuengamme. C'est là, qu'après peu de mois, M. LAROCHE devait succomber. De cette mort, nous ne savons presque rien, sauf qu'elle fut pleine de courage et d'espérance. Telle aussi avait été sa vie pendant l'occupation. M. LAROCHE était partout quand il le fallait pour ranimer les courages et entretenir la foi dans la victoire. Son action, qui était pour la région tout entière un stimulant précieux. s'exerçait presque en public. Aussi devait-elle l'exposer aux ligueurs de l'ennemi. À la première occasion, la Gestapo ne le manqua point. Elle eut raison de son prosélytisme généreux et bientôt de sa vie même. Quatre mois de privations et de souffrances avaient suffi pour le terrasser.
La Chambre regrettera ce collègue auquel un sort tragique n'a pas permis de donner sa pleine mesure. Elle l'honorera pour son sacrifice patriotique.
Notre Assemblée adresse à la veuve d'Albert LAROCHE et ses quatre enfants le témoignage douloureux de la part qu'elle prend à leur immense chagrin.
Acte de naissance à Lokeren, OV, BE (Source [358]) (Télécharger
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Acte de décès à Neuengamme (Hamburg - Hambourg), DE (Source [665])
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